Si elle est fréquente entre agriculteurs partageant les mêmes préoccupations, l’entraide doit répondre à des critères précis pour rester dans la légalité. À défaut de les respecter, vous vous exposez à un procès-verbal pour travail dissimulé et à devoir régler auprès de la MSA les cotisations correspondant aux tâches réalisées. Zoom sur les formes d’entraide existantes et leurs restrictions prévues par la loi.
Les coups de main tolérés en France
Vous pourriez de bonne foi penser que votre famille par exemple, est en droit de vous aider sur votre exploitation. Prenez garde car toute intervention prolongée vous impose de déclarer un travail réalisé, les « coups de main » étant strictement limités par le législateur.
Le bénévolat
Comme son nom l’indique, le bénévolat doit être parfaitement désintéressé. La jurisprudence ajoute que le concours apporté doit être spontané et non sollicité, et que les structures économiques à vocation lucratives comme les SCEA ou l’EARL ne peuvent en aucun cas y recourir. Seules les associations à but non lucratif peuvent donc profiter de bon droit de l’aide de bénévoles.
En pratique, le bénévolat est de courte durée : en cas d’urgence, un voisin, membre de la famille ou ami peut apporter un soutien pour retrouver des bêtes égarées par exemple. En aucun cas un bénévole ne pourra participer à une récolte prévue, sous peine de voir des sanctions pénaliser l’exploitant.
L’entraide familiale
Elle n’est autorisée qu’entre parents directs au premier degré : parents, enfants, frères et sœurs ou conjoint. L’aide apportée doit rester exceptionnelle et ne pourra se substituer à un poste de travail normal et régulier au sein de l’exploitation. Elle ne pourra donc être pérenne, et l’exploitant ne devra exercer aucune autorité hiérarchique sur l’aidant.
L’entraide entre agriculteurs prévue par la loi
Venons-en à présent aux formes d’entraides qui, bien organisées, peuvent apporter un réel soutien aux exploitations agricoles sur le long terme.
L’entraide agricole
Le Code Rural et de la Pêche Maritime en fixe les conditions à son article L 325-1. Décidées oralement ou mises par écrit entre agriculteurs, deux formes d’entraide sont possibles :
- Le service en travail : assistance pour les semis, vendanges, etc.
- Le service en moyens d’exploitation, pour le prêt de machines agricoles principalement.
Si le service est obligatoirement gratuit, le mot d’ordre est la réciprocité. Un agriculteur peut en aider un autre, à condition qu’un service équivalent soit rendu en retour. Pour en mesurer la valeur, chaque Chambre d’agriculture met à disposition un barème d’entraide agricole traduisant le type de service en valeur marchande. Ainsi, en cas de déséquilibre, l’agriculteur lésé peut se faire payer une soulte pour les services rendus en excès.
Le prêt de salariés
Une entreprise connaissant une baisse d’activité est en droit de détacher – temporairement – un salarié auprès d’une autre société ayant un besoin de personnel accru. Une convention précisant l’ensemble des modalités doit être établie entre les deux entreprises qui doivent, comme le salarié concerné, donner leur accord explicite.
Cette mise à disposition s’accompagne d’une facturation correspondant au salaire qui continue d’être versé à l’employé par l’entreprise prêteuse avec en sus, le cas échéant, les frais de déplacement ou autres charges supplémentaires.
L’aide apportée par les visiteurs du monde agricole
Il peut arriver qu’un agriculteur reçoive une aide ponctuelle et non rémunérée, dans un cadre lié au tourisme. Là encore, la possibilité d’action est strictement définie.
Le WWOOfing
L’accueil par les agriculteurs biologiques se développe, de visiteurs souhaitant découvrir un mode de vie différent et centré sur notre synergie avec la nature. Dans le cadre de cette découverte et en partageant le quotidien de l’exploitant, le visiteur peut être amené à participer à certaines tâches.
Cette pratique est alors tolérée par la loi, à la condition qu’il reste libre de sa participation. L’accueil ne doit pas être régulier et doit avoir une durée limitée.
Attention, le WWOOfing ne doit pas être nécessaire à l’exploitant, c’est-à-dire répondre à un vrai besoin de main-d’œuvre au sein de l’exploitation ; faute de quoi il pourra être requalifié en travail dissimulé par les autorités.
L’œnotourisme
Dans le même esprit, l’œnotourisme permet aux amateurs de découvrir la vie du vigneron, son quotidien et son travail concret. Parmi les activités proposées peuvent figurer des tâches comme les vendanges, habituellement réservées à des travailleurs salariés.
De la même manière que pour le WWOOfing, afin que ce coup de pouce reste légal il ne devra revêtir aucune importance productive pour l’exploitant. Et bien entendu, aucune rémunération ne devra accompagner le travail effectué. C’est même le visiteur qui rémunère ici le vigneron pour l’accueil au sein du domaine.
Il n’est pas toujours facile de placer dans une case l’assistance reçue sur une exploitation. Retenez avant tout que toute forme d’aide donnant lieu à un paiement lié à celle-ci, doit faire l’objet d’une déclaration d’emploi de main-d’œuvre. Pour les autres cas, il appartient à l’autorité exerçant le contrôle d’apprécier la légalité de l’entraide, notamment quant à la durée de celle-ci. Si votre besoin de main-d’œuvre est récurrent, pensez à la possibilité de créer un groupement d’employeurs qui facilitera les démarches.